Une problématique longtemps ignorée, désormais au cœur des politiques publiques
Pendant des décennies, les violences intrafamiliales (VIF), ou plus communément appelées Violences Conjugales, ont été cantonnées à la sphère privée, invisibilisées par la société comme par le droit. Aujourd’hui, elles font l’objet d’une véritable reconnaissance juridique, avec des outils législatifs et judiciaires dédiés à la protection des victimes, en particulier les femmes et les enfants.
Dans cet article, nous retraçons les grandes étapes de cette évolution en France et les mécanismes de protection désormais en place.
Un peu d'histoire : de l’ignorance à la reconnaissance des violences conjugales
Les années 1970-1990 : la fin du silence
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1975 : Premier refuge pour femmes battues à Clichy.
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1980 : Le viol est reconnu dans le Code pénal.
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1990 : Reconnaissance du viol entre époux.
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1992 : La qualité de conjoint devient une circonstance aggravante.
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1994 : Intégration des violences conjugales au Code pénal.
2000-2010 : vers une approche publique structurée
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2006 : Éloignement du conjoint violent, inclusion du PACS/concubinage.
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2010 : Loi du 9 juillet → création de l’ordonnance de protection (OP), stages de responsabilisation.
Depuis 2018 : un tournant face à l’urgence
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2018 : Loi Schiappa, renforcement des délais de prescription et définition du viol.
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2019 : Grenelle des violences conjugales et création de mesures d’urgence.
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2020-2023 : Généralisation des téléphones grave danger (TGD), bracelets anti-rapprochement (BAR), chambres spécialisées.
Violences conjugales : que dit le droit pénal aujourd’hui ?
Les violences intrafamiliales sont des infractions pénales clairement définies :
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Article 222-13 : violences avec ITT < 8 jours.
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Article 222-14-3 : violences au sein du couple.
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Article 222-33-2-1 : harcèlement moral.
Des procédures judiciaires accélérées et des dispositifs d’alerte renforcent la réactivité des autorités et des mécanismes de protection ont été mises en place par les dernières lois.
Les dispositifs de protection : une réponse proactive du droit
1. L’ordonnance de protection (OP)
C'est une mesure centrale dans la protection du conjoint violenté et elle permet :
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L’éloignement immédiat de l’auteur,
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L’attribution du logement,
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La réorganisation de l’autorité parentale,
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L’interdiction de contact et de port d’arme,
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Une aide juridictionnelle automatique.
Délai moyen : 6 jours depuis 2020 (vs 42 auparavant).
Malgré les délais de procédure qui ont explosé depuis le Covid, cette mesure est plutôt efficace.
2. Le téléphone grave danger (TGD)
Attribué par le procureur, il permet une alerte rapide en cas de menace.
3. Le bracelet anti-rapprochement (BAR)
Géolocalisation de l’auteur et alerte automatique s’il franchit le périmètre de sécurité.
4. Centres d’accueil et aides sociales
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Logements d’urgence,
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Aide psychologique et financière,
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Médiation et accompagnement professionnel.
De nombreuses structures associatives existent pour aider, notamment, les femmes à se prémunir des violences conjugales. Il existe également de nombreux sites informatifs officiels et communautaires sur ce sujet et qui fourmillent d'informations pratiques.
Un haut conseil a été créé pour l'égalité hommes-femmes, et lorsque le parent violent a été reconnu coupable, il est possible de solliciter un retrait de son autorité parentale. Sur ce point, n'hésitez à lire cet article sur le retrait de l'autorité parentale.
Des chiffres révélateurs… mais incomplets
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271 000 victimes recensées par les forces de l’ordre en 2023 (+10 %).
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87 % sont des femmes.
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Seules 20 % des victimes portent plainte.
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118 féminicides en 2022.
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Les enfants co-victimes restent encore peu visibles.
🔎 Ce qu’il reste à faire
Malgré des avancées notables, plusieurs défis subsistent :
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Assurer une application uniforme sur tout le territoire.
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Former les professionnels de la justice, santé, éducation.
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Mieux prendre en compte les enfants exposés.
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Renforcer la prise en charge post-traumatique.
En conclusion : un droit qui se mobilise, une société en vigilance
La reconnaissance juridique des violences intrafamiliales n’est plus une option : elle est désormais un pilier de l’action publique. Mais la lutte reste à affiner, prévenir et reconstruire pour protéger durablement les victimes.
